Dimanche 18 février 2024, je me rends au parc animalier de la Barben pour m'exercer. L'histoire de cette image ne peut commencer sans que j'apporte quelques précisions.
J'ai pendant très longtemps porté un regard assez sombre sur l'exploitation des animaux, sous quelque forme que ce soit. Autant ce regard n'a pas changé pour ce qui concerne les jeux d'argent et de paris sur des courses de chiens, équestres ou pire, des combats de chiens, mais pour les parcs animaliers, la vie m'a fait évoluer autrement.
Je pense aujourd'hui qu'il ne me faut pas me tromper de cible. Si les parcs animaliers revendiquent leur légitimité par la sauvegarde des espèces, il faut tout de même avouer qu'il y a une réalité concrète en cela. L'espèce humaine n'a pas attendu les zoos pour exploiter l'animal, y compris dans la photographie qui a généré un commerce considérable dans le domaine des safaris photo. N'oublions pas les safaris de chasse, qui n'étaient que la version politiquement acceptable du braconnage. Payer pour le droit de tuer, on ne fait pas mieux dans les meilleurs James Bond !
En allant photographier dans un parc animalier, j'étais animé par un sentiment de non jugement. Certes les animaux sont contraints, certes leur environnement n'est pas celui de leur terre d'origine. Pour autant l'éléphante Dora est une voie d'inspiration dans l'acceptation et la compréhension de ce type de structure*.
Dora l'éléphante est malvoyante. Elle est extrêmement craintive, et il a fallu des années à ses soigneurs pour l'habituer à accepter, avec un minimum de peur, les visiteurs qui bien souvent, crient, et ne comprennent pas vraiment la réalité de l'animal. On ne peut leur en vouloir vraiment, ils payent pour venir voir ce qui est bien plus qu'un spectacle. Si le parc ne se pliait pas au devoir de l'ouverture au public, il ne pourrait survivre, et tous ses pensionnaires avec lui, qu'avec les dons particuliers. Qui nous le savons tous, sont devenus insignifiants, tant les sollicitations sont nombreuses.
J'ai rencontré Dora pour la troisième fois de ma vie ce jour-ci, en fin de journée. La lumière avait disparu, et les allées du parc étaient désertées. Dora semblait être contre un mur. Elle avançait et reculait, d'un pas alterné. L'image était triste, car elle donnait l'impression de se taper la tête contre le mur (ce qui n'était pas le cas). J'ai donc intégré ce mur dans mon image.
Le développement de l'image a été réalisé pour faire "monter" les différences de teinte de la peau de Dora, et surtout sa richesse, mais aussi pour conserver le caractère "drapatique" du moment tel qu'il m'est apparu.
Juste après mon déclenchement, Dora s'en est allée dans un autre lieu du parc, empruntant un passage qu'elle ne voit pas, ou très mal.
Si Dora était dans la Nature, qu'adviendrait-il d'elle ? Si tous les animaux de ce parc étaient actuellement dans la Nature, leur vie serait elle plus simple qu'en ces lieux ? Les questions sont légitimes. Ma belle fille travaille comme soigneuse, elle est toute jeune et passionnée. Ce métier n'est pas tous les jours facile me dit-elle, mais elle me raconte aussi les liens qui se tissent entre ces animaux si fragiles et particuliers, et leurs soigneurs.
Il n'y a pas de différence entre un animal domestique ou d'élevage maintenu dans un espace restreint et ces animaux dits sauvages, et qui ne le sont plus. Ils sont les sanctuaires d'espèces que l'humanité a littéralement décidé d'exterminer, jusqu'au dernier spécimen vivant, pour des gains financiers.
Chacune de ces vies, préservée et entretenue est un témoignage vivant fait aux enfants de ce monde. Chaque parent qui sait ouvrir les yeux et la conscience de ces enfants sur l'impérieuse nécessité de préserver la vie en tout lieu et toutes circonstances est une lumière en ce Monde.
Denis Mourizard
PS : Je n'affirme pas que tout est parfait ici. Rien n'est jamais parfait, à part peut être ce que la nature a créé.
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